lundi, novembre 5

Patrick Wolf, Ancienne Belgique, 31 octobre 2012 (I)

Voulant préparer la rédaction de ce billet, je me suis rendu compte que je n'avais bizarrement chroniqué aucun de mes concerts de Patrick Wolf par ici. Celui-ci sera donc l'occasion d'un petit bilan rétrospectif.

J'ai découvert Patrick Wolf dans le NME un peu avant la sortie de son premier album, commandé dans la foulée sur Amazon (Amazon, qui se souvient de tout, me rappelle que dans cette commande se trouvaient aussi The Rapture, Mark Owen, Justin Timberlake, Atomizer et Richard X, c'était donc en plein milieu de ma phase de réamour avec la pop).

Immédiatement tombé sous le charme de l'electro-pop de Bloodbeat et de la folk biscornue de Pigeon Song, j'en parle partout autour de moi, me faisant le héraut de la bonne parole lupine sur les forums (Popjustice) et les mailing-listes que je fréquente (la défunte Lenoirliste), allant jusqu'à le "plugger" aux radios que j'écoutais à l'époque (Radio 21 par exemple). Je finirai même par l'interviewer pour la Blogothèque (une expérience dont je garde un souvenir mitigé; ayant négligé la difficulté technique de l'enregistrement de la conversation, la transcription fut très difficile et le résultat écrit décevant).

Je garde de cette période de "militantisme" un fort investissement émotionnel dans la carrière du bonhomme. Contrairement à la plupart des artistes que je suis, j'assiste à un concert de Patrick Wolf pas seulement pour le plaisir de l'entendre chanter ou de le voir titiller la corde avec son archet, mais aussi pour prendre de ses nouvelles. Où se situe-t-il dans sa carrière ? Est-il heureux de jouer ? Aime-t-il encore son "métier" ? Quel est son public ?

De ce point de vue, les enseignements au cours des années furent nombreux et variés. Au début de sa carrière, Patrick Wolf n'aimait guère la scène et cela se sentait. Il était emprunté, mal à l'aise, taiseux. C'était particulièrement le cas lors de son tout premier concert en Belgique, à l'AB Club en 2004 (je me souviens que, une demi-heure avant de jouer, il traînait, l'air mal à l'aise, près du stand merchandising et que sa manager de l'époque, qui tenait le stand, l'encourageait à faire un effort en lui répétant que c'était 'an important gig!') ou lors de son premier passage au Pukkelpop en août 2005.

Pour compenser, il s'était ensuite dissimulé derrière une course à l'extravagance qui se manifestait notamment dans les costumes. Ensuite, lors de son (court) passage sur une major pour le troisième album, son comportement sur scène était devenu proche de l'auto-destruction. Il piquait des colères terribles, balançant des sièges sur ses musiciens, écourtant ses concerts sur un coup de tête, congédiant ses musiciens. Les concerts de cette époque auxquels j'ai assisté m'avaient durablement attristé. Le loup était en berne, la flamme éteinte, l'envie absente. Il semblait n'être sur scène que parce qu'il y était contractuellement obligé, possiblement sous l'emprise de quelque drogue en -ine. L'album, The Magic Position, ayant en outre été pour moi une déception, j'avais à cette époque presque renoncé à le suivre.

Heureusement, il a rapidement quitté son label (ou été viré, les versions divergent) pour financer son album suivant sur Bandcamp, amorçant ainsi une renaissance qui a donné lieu à The Bachelor, un de ses meilleurs albums, coproduit en partie par Alec Empire, et à sa meilleure tournée (le concert d'octobre 2009 au Bota était parfait). Le dernier album était plutôt bon mais le concert de la Rotonde en 2011 était une énorme déception, pour des raisons qui deviendront claires dans le prochain billet. Pendant ces années, j'ai aussi vu son public évoluer, sensiblement rajeunir et se féminiser, jusqu'à devenir à certains moments un public de midinettes, ce que confirment d'ailleurs des forums presque désertés et des pages tumblr hyperactives pleines de gifs  kikou-lol-too-cute.

Prendre un ticket pour un concert de Patrick Wolf revient donc souvent à acheter une pochette surprise. On ne sait jamais ce que l'on pourra en fin de compte en retirer, à tel point que j'avais fini par appréhender mes rendez-vous annuels avec Patrick, susceptibles de se révéler, le jour venu, magiques ou désastreux, sans que le public, à chaque fois conquis d'avance, n'y puisse rien changer.

(la suite ici)

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