mercredi, mai 6

Déconfinons les disques encore sous cellophane (I)

En ces temps de réouverture au monde, il m’apparaissait particulièrement indiqué de libérer de leur enfermement prolongé des disques qui, bien que posés sur une de mes étagères, n’avaient encore jamais connu l’air libre, la joie de sentir le vent glisser le long des sillons du vinyl ou raser la couverture laquée recouvrant le codage binaire d’un CD.

Comme je suis amateur de blindtests, je déconfine mes disques à l’aveugle. Une fois le disque sorti de l’étagère, je le déballe et le place dans la platine sans en regarder la pochette. A moi ensuite de fouiller à travers 500 ans de musique, aide de ce seul indice, moins discriminant qu’il le devrait, que, à une époque plus ou moins lointaine, j’avais considéré que posséder ce disque était une bonne idée.

Aujourd’hui, un digipack, sans doute acheté d’occasion car non cellophané. 10 morceaux, 39m21s.

Ma première pensée à l’entame du CD est qu’il doit s’agir d’un album de Charlotte Gainsbourg : même voix légèrement voilée, mêmes mélodies susurrées qui jamais n’utilisent d’intervalles trop grands, la voix utilisée comme nappe, couche sonore supérieure surnageant au-dessus d’un tapis de guitare et de claviers vaguement vaporeux.

Ensuite, le timbre de voix n’étant pas totalement celui de Charlotte, ce sont les guitares, parfois saturées, qui m’intriguent et me font un instant penser aux Breeders mais la voix ne correspondrait dès lors plus vraiment. Cette dernière me fait un instant penser à Drugstore mais la musique ne collerait pas plus, vaporeuse, fuzzy, presque shoegaze dans sa manière de sous-mixer les voix.

A ce stade de mes réflexions, je me retrouve environ à la moitié du CD et une connexion 4AD reste mon hypothèse de travail privilégiée, un groupe comme Lush ou Belly par exemple, dont je connais mal la carrière et le style, mais dont j’aurais tout à fait pu acheter le CD dans une solderie quelconque pour cause de simple attachement au label.

Je tends l’oreille et quelques bribes de paroles parviennent jusqu’à moi :  « You’re my/a terrrible friend. » Ca ne m’aide guère.

Plage 8 : coup de théâtre, les guitares prennent nettement le dessus sur les synthés et un homme prend le micro tandis que la voix féminine est, tout au plus, reléguée dans les chœurs. Le morceau se termine sur un long larsen. Les nappes de synthétiseurs semblent passées de mode lorsque le disque entame sa longue descente vers la dernière plage.

Ainsi, sur le neuvième morceau, une guitare joue des arpèges Marresques, une guitare rythmique des accords saturés, une batterie métronomique scande sa pulsation, tandis que flotte à nouveau par-dessus cette voix blanche et ce genre de mélodies étales qu’il serait impossible, même pendant que la chanson passe en arrière-plan, de chantonner tellement elle fait partie intégrante d’un tout, sans aucune vocation à prendre le dessus. Les instruments n’accompagnent pas la voix comme dans 80% de la pop, la voix est ici un instrument parmi d’autres et participe à ce même effort de générer une atmosphère d’attente, de suspension, à la fois euphorisante et enveloppante. A cause de la voix, je pense soudainement à Ladytron, avant de rejeter immédiatement l’idée : pas assez pop, pas assez glacé, pas assez synthétique.

CONCLUSION : Sans doute un disque des années 90, une connexion 4AD semble probable.

BEST GUESS : Lush

VERDICT : Plantage total. Aucun lien avec 4AD et sorti quinze ans plus tard que ce que je pensais. CD acheté 2€ au Point Culture.

https://www.discogs.com/The-Pains-Of-Being-Pure-At-Heart-Belong/master/322410



Aucun commentaire: