Attention : Ce billet contient de grosses pépites de fanitude obsessionnelle.
Le principe de la collection Back To Mine est de proposer à différents artistes de compiler leurs morceaux préférés. Je n'avais jusqu'à la semaine dernière jamais écouté aucun des CD sortis sous ce nom mais la rumeur veut que le résultat soit en général à mi-chemin entre la lounge et la chillout music, deux genres que j'associe a priori assez peu avec les Pet Shop Boys. C'est donc avec une certaine curiosité que j'attendais de voir ce qu'ils allaient parvenir à tirer de ce format. En fait, ils ont en partie contourné le problème en créant deux CD, un pour chaque membre du groupe. Tandis que Neil jouera le jeu du chill-out ambient, Chris se lancera à corps perdu dans l'hédonisme disco. A ce titre, le projet est aussi un document précieux sur la dynamique du groupe qui permet de mettre en relief les différences d'inspiration entre les deux musiciens, ainsi que l'écart qui sépare leurs centres d'intérêt actuels. On pouvait en effet difficilement imaginer disques plus différents même si, en interview, ils insistent sur le fait que les deux CD ne sont pas mutuellement exclusifs et que l'un aime souvent une grande partie de ce que l'autre a choisi.
Le CD1 est compilé par Chris ('songs about love, friendship, sex, religion, hope and despair') et sa première moitié sert essentiellement à mettre au jour, avec une étonnante candeur, tous ceux que les Pet Shop Boys ont plagié au début de leur carrière. Les quatre premiers morceaux d'"italo-disco" (tous sortis entre 1982 et 1983) donnent toutes les clés du son des Pet Shop Boys, des premières démos réalisées avec la producteur Bobby Orlando (dont une chanson, Passion, est reprise ici) jusqu'au premier album inclus. Pour qui n'a pas connu cette époque, c'est tout un pan de leur inspiration qui se voit ainsi soudainement révélé et je n'écouterai plus jamais That's my impression par exemple de la même façon. En guise de transition, le CD embraye sur une grande chanson oubliée des années 80, Ti Sento de Matia Bazar, sortie en 1986 et qui, pour le coup, fonctionne pour moi comme une vraie madeleine de Proust.
Après cette belle unité de style, la seconde moitié du disque part un peu dans tous les sens. Nous avons d'abord le décidément formidable Never Be Alone de Justice vs Simian, paru l'année dernière sur le label International Deejay Gigolos qui, après Hooked on Radiation d'Atomizer et Emerge de Fischerspooner, prouve qu'il a décidément l'oreille fine pour repérer les pépites rares dans le tout-venant electroclash.
Le morceau suivant, The Show must go on de Queen, a fait couler beaucoup d'encre et les forums consacrés au groupe se sont étripés jusqu'au sang pour savoir si une telle 'faute de goût' était excusable. La majorité semblait peu encline à pardonner. De un, c'est du rock (il y a même un solo de guitare, c'est dire) et Chris avait fameusement déclaré "I don't like rock music". De deux, à notre époque, aimer Queen est encore résolument 'uncool'. De trois, tout le monde connaît déjà le morceau, ce qui rend quasiment impossible d'invoquer la réhabilitation ironique réservée aux morceaux tombés dans l'oubli. Pour ma part, je dois bien avouer avoir toujours eu faible pour ce dernier album de Queen même si je ne suis pas sûr qu'avoir une troisième copie de la chanson sur CD s'imposait vraiment.
La fin du CD flirte régulièrement avec le plus grand n'importe quoi. Nous avons d'abord un improbable morceau de Celestial Choir (qui date, bizarrement, de 2002), une sorte de chorale d'enfants disco, puis un morceau de Carl Bean (1977) dont le degré de campitude ferait passer les Scissor Sisters pour Motörhead, 'I'm happy. I'm carefree. I was born this way.'. Ayant toujours éprouvé une quasi-aversion pour la disco, je passe en général directement au dernier morceau, une ballade aux petits oignons de Dusty Springfield millésime 1978 et mon premier contact avec la Dusty de la grande époque.
A la première écoute, ce CD semble un peu partir dans tous les sens. Pourtant, quand on le considère rétrospectivement, une unité thématique se dégage assez clairement. Chris Lowe y pose un regard nostalgique sur une époque révolue, où il avait encore des cheveux, passait ses soirées en boîte et s'immergeait dans la culture 'club'. Aujourd'hui, à plus de 45 ans, il est presque chauve, porte les cheveux longs et les teint en blond pour faire illusion. Il lui faut sans doute une semaine pour se remettre d'une nuit blanche, mais qu'importe, The show must go on et le disque résonne comme un manifeste : "Rien ne m'empêche de conserver mon état d'esprit de 20 ans et de danser jusqu'au bout de la nuit."
Je ne sais trop que penser de cet était d'esprit. Il forme en tout cas un contraste saisissant avec celui de Neil qui préfère de loin "passer les soirées seul à la maison en écoutant Chostakovich avec un verre de vin.", ce que son CD confirmera brillamment.
J'en reparle demain.
1 commentaire:
Le morceau de Celestial Choir a été édité en 2002 mais doit dater des années 70 puisqu'il est produit par le chantre du disco Larry Levan.
On le retrouve sur deux autres compils, celles de K.I.M. et Optimo.
Un excellent choix en tout cas, typiquement le genre de morceau à passer en fin de soirée.
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