(suite de ce billet)
Cela fait bientôt cinq ans que je considère The Coral comme le meilleur groupe pop anglais et j'aurais en toute logique dû les voir quatre fois en concert. Et pourtant... A la Route du Rock, ils étaient passés plus tôt que prévu et je les avais ratés de quelques minutes. Au Festival des Inrocks, ils avaient annulé au dernier moment. Je ne les ai donc vus que deux fois, à chaque fois au Pukkelpop. Pire, alors que la musique du groupe me semble a priori parfaite pour clôturer la soirée au Marquee, où ils pourraient jouer une heure devant un public réceptif, les organisateurs s'entêtent à les programmer en tout début de journée sur la grande scène. C'est désespérant. L'heure matinale et le gigantisme (tout relatif) du décor achèvent de diluer le peu d'énergie que le groupe semble prêt à investir pour leur prestation. Il y a deux ans, le groupe avait poussé le foutage de gueule jusqu'à interpréter leur version de 15 minutes de Goodbye, qui durait donc la moitié du concert. J'en aurais pleuré. Tant de chansons formidables sacrifiées sur l'autel d'une jam-session interminable. Cette année, ils ont au moins accepté de multiplier les morceaux : une petite quinzaine sur les 35 minutes qui leur étaient allouées. Malheureusement, les versions jouées sont souvent indistinguables des versions studio ce qui, le je-m'en-foutisme du chanteur aidant, donne objectivement au concert un intérêt limité. Heureusement qu'en toute fin du set, un Arabian Sands un peu plus pêchu vient réinsuffler un peu de vie dans un concert mollasson. Je continuerai à défendre les disques du groupe mais, en attendant de les voir enfin dans de bonnes conditions (une date à l'Ancienne Belgique ou au Botanique en cinq ans, ça ne me semble pas être une exigeance excessive), je dois bien avouer qu'ils sont peut-être un des pires groupes de festival qui puissent s'imaginer et ce n'est que grâce au niveau des chansons que je dois d'avoir finalement passé un bon moment.
TTC ayant retardé son set jusqu'à 1h20 du matin, nous errons pendant une petite demi-heure d'une scène à l'autre, juste le temps de voir Mocky mettre ses oreilles de souris (un fil de fer recourbé recouvert d'un collant) pour Michey Mouse Motherfucker et nous partons nous installer pour le concert de Annie. Annie est depuis quelques mois l'alibi pop préféré des indie-snobs du monde entier. Elle allie un soupçon d'exotisme (depuis Morten, les pop-stars norvégiennes sont assez rares), un carnet d'adresses bien rempli (Richard X produit) et une confidentialité de bon aloi (j'attends toujours de voir ses clips sur MCM). Il n'est donc pas rare de lire ici ou là qu'Annie se situe cent mille lieues au-dessus des Britney, Kylie, Rachel dont se contente le bas-peuple. C'est évidemment tout le contraire et Annie n'est jamais aussi intéressante que lorsqu'elle parvient à se rapprocher de ses glorieuses consoeurs, ce qu'elle n'a nulle peine à faire sur une triplette de singles imparables (Chewing gum, Me Plus One et Heartbeat) mais qui devient une tâche nettement plus ardue avec le reste de son répertoire qui, à l'image de son album, m'a semblé un peu en-dessous. De plus, je regrette un peu que son statut de pop-star crédible la pousse à refuser le "spectacle" et à miser sur le minimalisme pour défendre sa prestation. La scène est vide à l'exception d'une table sur la droite où un DJ finlandais bidouille quelques effets sonores (et semble fermement décidé à rentabiliser son nouveau jouet, un boîtier qui fait un bruit de pistolet laser quand on le frappe avec une baguette). Il incombe donc à la frêle Annie de captiver l'attention, et bien qu'elle soit indéniablement aidée par une apparence de blonde sexuelle de poche (même Kylie Minogue semble plus grande), des bottes en cuir, un petit gilet turquoise et un art du déhanchement qui en souffre aucune contestation, elle peine parfois à empêcher l'esprit de vagabonder, d'autant que la qualité sonore était assez médiocre et sa voix régulièrement inaudible. Un jour peut-être, la pop ne sera plus un gros mot en festival et nous aurons droit à un show extravagant avec danseurs, paillettes et changements de costumes. On peut rêver. Cela dit, j'ai passé tout le reste de la journée à chantonner 'Feel my heartbeat', c'est donc que, même dans cet état de dépouillement spartiate, l'âme (Annie-ma ?) des chansons est parvienue à percer.
Nous enchaînons avec Goldie Lookin Chain. 10 gallois en training (Nike et Adidas uniquement), tee-shirts et casquettes, portant tous fièrement un collier qui, bizarrement, semble plutôt en argent qu'en or. Le spectacle sur scène est assez difficilement descriptible. Pendant 45 minutes, pas un des membres ne sera resté immobile plus de 10 secondes et il est parfois difficile de savoir à quel degré tout cela doit être pris, bien que je doute fort que cela soit au premier (leurs rôles sur scène sont clairement de composition). Je ne comprends pas grand-chose aux paroles, sauf pour les singles qui passent à la radio (essentiellement Guns don't kill people, rappers do), mais ce n'est pas très grave. Les morceaux sont construits de telle manière qu'il suffit d'entendre une fois le refrain pour être capable de le reprendre en choeur, si possible en bougeant le bras pour passer inaperçus dans la masse (comme à mon habitude, j'étais dans les premiers rangs). Ce fut pour moi un des tout meilleurs concerts du festival. Il est amusant de voir comment, sur un canevas formel très proche (y compris cette règle immuable voulant que les deux dernières syllabes de chaque phrase doivent être dites par tous les rappeurs présents sur la scène), le rap européen (j'y inclus TTC dont je parlerai plus tard) parvient à créer un genre qui me parle beaucoup plus que le rap US, qui se prend souvent trop au sérieux pour parvenir à m'intéresser (si on excepte Outkast, Missy Elliott et, dans une moindre mesure, Eminem). Lorsque Your mother's got a penis s'achève, j'ai un sourire jusqu'aux oreilles et un coup d'oeil autour de moi me prouve que je suis loin d'être le seul. Si je voulais donner l'impression d'être un "B-boy" dans l'âme, j'ajouterai qu'ils ont un "flow" très fluide, mais j'ai peur de paraître ridicule en écorchant les termes techniques. Je m'abstiendrai donc.
Vous saviez qu'il existait un groupe répondant au doux nom de Zornik... Non ? Moi non plus. Maintenant je sais, mais je ne dirais pas que ça a changé ma vie. En revanche, je savais bien qui était The Go! Team et j'allais voir leur concert sans rien en attendre de particulier. J'avais tort. Leur musique est principalement centrée sur l'énergie véhiculée par les rythmes et fait assez peu de cas de la mélodie (mon Graal). En conséquence, l'écoute de l'album a tendance à rapidement m'ennuyer. Il n'en est plus tout à fait de même en concert, principalement grâce à la chanteuse-rappeuse, dont l'enthousiasme est franchement communicatif. Entourée de ses 5 acolytes et de son tee-shirt rose, elle exhorte le public à danser ("This one is very simple. You just have to do this with your shoulder and step aside.") et le public, pas chien, s'exécute. Ladyflash et Untitled deviennent ainsi en concert de redoutables machines à faire bouger (ce que leur écoute sur disque ne laisse qu'imparfaitement présager). Cela dit, le morceau que j'ai préféré est sans doute le plus calme, celui où le groupe lève le pied de l'accélérateur et laisse libre cours à son sens de la mélodie sucrée (voir aussi le sublime The Ice Storm). On ne se refait pas.
LIENS : Deux vidéos de Annie à regarder ici.
(la suite ici)
2 commentaires:
Petite question à deux balles: tu attends quoi d'un concert?
Qu'ils refassent l'album note pour note? Qu'ils changent tout au risque du grand n'importe quoi? L'énergie? D'être ému?
Et selon si tu connais le groupe ou pas?
Phouïaïaïe, tu poses de ces questions... Ca varie selon le groupe, mon humeur ou mon état de fatigue. Disons que ce que je recherche a priori, c'est au moins un minimum d'interaction avec le public, de l'inattendu ou des bonnes chansons. Cela dit, la vision de concerts n'est pas une science exacte et je ne suis pas sûr que tout cela puisse se systématiser avec des critères stricts.
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