mercredi, février 8

Les albums de 2005 (XIII)

Brian Eno - Another Day On Earth (Opal/Rykodisc)
Je suis un fan de Brian Eno de la même manière que je suis fan de Dead Can Dance ou des Pet Shop Boys, c'est-à-dire au sens le plus basique du terme. En conséquence, j'ai souvent un peu de mal à émettre un avis objectif sur son oeuvre ou à exprimer clairement ce que je ressens en l'écoutant. Ca ne veut pas dire que j'aime sans retenue tout ce que Brian Eno a sorti au cours des trente dernières années (malgré son intérêt historique ou conceptuel, Thursday Afternoon est tout de même un disque profondément ennuyeux) mais simplement qu'écouter ses disques me procure une sensation de bien-être qui n'est pas très différente de celle qui accompagne les retrouvailles avec un membre de sa famille ou un vieil ami, un sentiment de familiarité immédiat dans lequel on peut se lover en toute sécurité, l'impression de se retrouver face à un fragment de soi-même, une page de son histoire personnelle que l'on avait perdue de vue. Comment pourrais-je dès lors espérer faire comprendre par écrit la joie que me procure l'écoute de ce disque, le premier album de chansons sorti par Brian Eno depuis la fin des années 70 ? C'est peine perdue. Je rajouterai donc simplement à ce que j'ai déjà écrit ici que, comme je le pressentais, c'est un album dont je ne me suis pas encore lassé.

Hanson - Underneath (Cooking Vinyl)
J'ai acheté quatre disques "honteux" cette année et une honnêteté chevillée au corps m'empêche de les passer sous silence, quand bien même leur présence ici fait sans doute s'effilocher les derniers lambeaux de ma crédibilité (mais qu'est-ce que la crédibilité sinon le fruit d'un conformisme bien géré, mmmh ?). Voici déjà le troisième, en attendant le dernier qui viendra clôturer la série en apothéose (à moins que la honte ne me le fasse passer sous silence, nous verrons). J'étais passé tout à fait à côté du phénomène Hanson à l'époque de son apogée (1997), pour cause d'intransigeance indie-snob. En effet, durant cette période très trouble de ma vie, j'écoutais en boucle Hovercraft, Flying Saucer Attack et Mice Parade et ne connaissais donc Hanson que comme cette fille blonde à la voix irritante que l'on voyait sans cesse sur MTV secouer les cheveux derrière son clavier en chantant des onomatopées débiles (MMMBop ?). Ce n'est que bien plus tard, le démon de la pop m'ayant à nouveau enserré dans ses doigts griffus, que j'ai découvert que la fille n'en était pas une et que le groupe avait même enregistré deux-trois très bonnes chansons (dont Weird, que j'aime encore beaucoup aujourd'hui). De plus, la manière dont les trois frères Hanson se jouent des reproches habituellement adressés aux groupes pop ne peut que réjouir le défenseur du genre que je suis. En effet, ils écrivent toutes leurs chansons et jouent toutes les parties instrumentales eux-mêmes. Mieux, ils accordent une importance tellement grande à leur "intégrité artistique" qu'ils ont claqué la porte de la major sur laquelle ils étaient signés pour monter leur propre label. Ils n'ont donc de leçons d'indie-attitude à recevoir de personne et, à ce titre, sont un peu le groupe idéal pour les débatteurs de mauvaise foi voulant confronter les indie-snobs de tous poils à leurs contradictions. Est-ce que tout cela fait de Underneath un bon album ? Pas entièrement, non. Je reconnais toutes les qualités du monde au premier single, Penny and Me, dont l'imparable refrain explique en grande partie pourquoi l'album s'est retrouvé entre mes mains. De même, Strong Enough to Break et Lost Without Each Other peuvent plaire si on aime la pop américaine à guitares des années 90 (de Blind Melon à Spin Doctors disons). Sur la longueur d'une chanson, c'est donc en général assez plaisant. Malheureusement, Taylor Hanson, bien que marié et père de famille, a conservé la voix geignarde de ses 12 ans, ce qui rend assez pénible l'écoute d'une traite de l'album. En fait, je crois que je préfère l'idée que je me fais du groupe à sa musique. Dans mon esprit, c'est plutôt un compliment (sans doute parce qu'il me semble qu'il vaut mieux faire de la mauvaise musique pour de bonnes raisons que l'inverse.)

Henrik Johansen - Vacker Utsikt (WERF)
Sans doute le disque le plus improbable de l'année. Henrik Johansen est un crooner suédois très populaire dans son pays. Sa voix se situe quelque part entre celles de Falco, de Gunther (You touch my tralala) et de Leonard Cohen. Henrik Johansen déroule son texte avec un débit mi-parlé, mi-chanté, qui se veut, et arrive souvent à être, sensuel (sur Flikka par exemple). On pense un peu au Joe Dassin de L'Eté Indien ou au Guy Marchand de Destinés. Ces références sont pourtant loin de rendre justice à l'album, où une ironie réjouissante semble irriguer la moindre inflexion de voix. L'imagerie du digipack, empreinte d'une forme de surréalisme ludique, confirme d'ailleurs cette impression. La musique en tant que telle pourrait être décrite comme une sorte de lounge cheap qui m'évoque beaucoup mon disque préféré de l'année dernière (Post Industrial Boys). Toutes les paroles sont en suédois. Je n'ai donc pas la moindre idée de ce que les chansons racontent mais le titre de la première sonne étrangement comme 'Your Horcrux' et ça, ça plait beaucoup à mon côté geek. En résumé, un des disques les plus jouissifs de l'année pour ceux qui conçoivent que l'on puisse écouter un album pour en sourire. Vivement recommandé. Plus d'informations ici.

3 commentaires:

AbsNoise a dit…

Ah les frères Hanson !

Des gueules de grunge pour une musique de supermarché. C'est pas si fréquent...

Pierre a dit…

"gueules de grunge" ? Juste parce qu'ils avaient des cheveux longs ? A ce compte-là, Jeanne Mas était goth, Obispo skinhead, Goldman punk et Desireless une nouvelle romantique. :)

(merci pour les morceaux de The Knife)

AbsNoise a dit…

Coment ça, Jeanne Mas n'est pas goth ?