jeudi, juillet 1

The lost riots

En cette époque où même les candidats recalés aux éliminatoires de Pop Idol Liechtenstein bénéficient d'un plan de promotion très serré, il est surprenant de voir que le premier album de Hope of the States ne sort que maintenant, plus d'un an après la sortie très remarquée du premier de leurs trois singles (mais que les retardataires se rassurent, ils sont tous repris ici). Le groupe a donc pris tout son temps, ce qui s'explique sans doute en partie par le suicide de son guitariste Jimmi Lawrence, juste après l'enregistrement de l'album.


Lorsqu'on tient l'objet en main, ce qui frappe tout d'abord est le soin apporté au visuel. Certes, il est rigoureusement inrangeable sur une étagère à CD mais il n'en est pas moins très beau. Il se présente dans une pochette en carton surdimensionnée qui s'ouvre par une languette prédécoupée (un peu à la manière d'un paquet de biscuits). L'ensemble est presque entièrement noir, avec juste le dessin d'un oiseau (un corbeau ?) posé sur un fil de fer barbelé. A l'intérieur, on trouve le disque proprement dit et un jeu de reproductions de planches médicales à l'ancienne (cerveau, coeur, poumons, etc..) sur lesquelles les paroles de morceaux se mélangent avec les noms des organes. L'ensemble est parsemé de petits dessins guerriers (soldats, archers, avions,...). De fait, tout l'album semble tourner autour de l'idée du soulèvement armé, de la révolution (notamment américaine, explicitement évoquée par George Washington et 1776). Cela se traduit par son titre 'The Lost Riots' ou bien encore des textes tels que
All the money in the world / Won't save You / We're coming home. / All the prisons that you build / won't hold us. / Just let us go.'


Le disque semble à première vue comme très politique, presque comme un appel à l'insurrection. Certains ne manqueront pas d'objecter que ce genre de discours perd beaucoup de sa crédibilité lorsqu'il apparaît sur un disque Sony Music mais il rend encore plus évident la parenté entre le groupe et Godspeed You Black Emperor. Outre dans le sous-texte politique, des similitudes se retrouvent dans l'instrumentation utilisée, dans la structure des morceaux ou encore dans le visuel dont ils s'entourent. Dans tous ces domaines cependant, s'ils s'inspirent de leurs cousins canadiens, c'est en refusant de se couper du grand public. Ainsi, ils n'hésitent pas à s'appuyer sur une major pour toucher le plus grand nombre et les longues plages de 20 minutes ou plus laissent la place à des morceaux construits comme de vraies chansons, plus courts et, oserais-je le dire, plus "pop". Ce parti-pris est parfaitement illustré par Black Dollar bills, le premier single, et une des révélations de l'année dernière. Ca commence par une voix seule sur un tapis de quelques notes de piano éparses. Les textes sont d'un nihilisme terrifiant
I've seen broken people smile. They lie [...] No one hopes for anything when there's nothing at all
Entre ce qu'on pourrait appeler des couplets, le refrain prend la forme d'un mur de guitares hurlantes, mais laissant une impression de grand calme (à la manière de ce que Mogwai faisait très bien sur Helicon), avant un final instrumental de trois minutes, sous la forme d'un long crescendo qui se dissout finalement dans le silence.

Ce morceau est un bon résumé de la manière dont ils semblent avoir abordé l'écriture de l'album. Une vision désespérée du monde mise en musique sous la forme de longues lamentations d'une beauté qui est souvent assez terrassante. Sur un canevas GYBEsque, ils parviennent à greffer à la fois la beauté fragile de Mercury Rev ET le sens de la démesure de Muse, ce qui n'est pas une mince affaire. L'album serait même à mon avis un petit chef-d'oeuvre s'il n'y avait la voix du chanteur, geignarde et un peu forcée. Sur le refrain du dernier single (The Red, the White, the Blues), ça finit même pas provoquer un certain embarras. On pense alors à plein de choses (notamment à un ivrogne qui chanterait à tue-tête au coin de la rue pendant que les braves gens essaient de dormir), mais plus du tout à ce que la chanson est censée évoquer. C'est peut-être ce qui explique que le premier morceau, instrumental, est celui que je préfère.

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