Lambchop - Awcmon/Noyoucmon (City Slang)
Sortir des albums doubles pour le prix d'un simple est plutôt une bonne idée marketing. Devant le rayon, l'acheteur potentiel se dit confusément qu'il en aura de toutes façons pour son argent. C'est d'ailleurs en partie la raison pour laquelle il s'agit du premier disque de Lambchop que j'achète à sa sortie. Et pourtant... Avec environ deux fois 45 minutes, ce double album ne contient pas tellement plus de musique qu'un simple CD de 78 minutes bourré jusqu'à la gueule. Pis, il donne une désagréable impression de remplissage. J'aimais bien leur album Nixon et je garde un bon souvenir de leur concert à Bruxelles lors de la tournée Is a Woman mais je dois bien avouer que pour décrire ce double album, le premier mot qui me vient à l'esprit est "ennui" : un ennui élégant, raffiné, de bon goût et qui ne manque pas de classe, mais un ennui quand même. C'est bien simple. Il suffit que je mette ce disque sur la platine pour instantanément penser à autre chose. Pourtant, j'aime bien le son Lambchop, notamment pour la voix de Kurt Wagner, mais ces chansons me filent entre les oreilles comme le sable sec entre les doigts d'un poing fermé. Je ne désespère pas que cela change un jour.
Bonnie "prince" Billy - sings Greatest Palace Music (Domino)
C'est amusant de réécouter ce disque juste après celui de Lambchop, qui est stylistiquement assez proche. Comment puis-je rester indifférent à l'un et succomber à l'autre ? Parce que la voix de Will Oldham est plus émouvante que celle d'un vieux briscard comme Kurt Wagner ? Parce que la production est plus variée (même si le producteur de ce disque vient de Lambchop) ? Parce que la pochette est plus jolie (le pseudo-Cézanne à l'avant, pas la franchement terrifiante photo de Will à l'arrière) ? Peut-être tout simplement parce que les chansons sont meilleures. De plus, ce disque a une fonction pratique. En sa qualité de pseudo best-of aux hormones, il me permet de faire une croix sans trop de mauvaise conscience sur les disques de Palace (dont je n'ai jamais entendu une traître note) et de me contenter des albums de Bonnie 'prince' Billy.
Post Industrial Boys - Post Industrial Boys (gogi.ge.org)
Un OSNI réalisé par un groupe de musiciens (apparemment) géorgiens (la Géorgie ex-soviétique, pas l'américaine). Le boîtier arbore sur sa face arrière une faucille et un marteau noirs sur fond couleur yaourt aux fruits des bois. Pas de nom de label reconnaissable ni de date de sortie. Juste, bizarrement, un code-barres. La pochette mentionne comme compositeur et producteur un certain George Dzodzuashvili tandis que l'écriture des textes est le plus souvent laissée aux interprètes de chaque titre, qui ont tous des noms en -dze ou en -shvili. C'est à une chronique des Inrocks que je dois la découverte de ce petit bijou (comme quoi, ils peuvent toujours surprendre). De mémoire, elle faisait référence pour décrire l'album à Bacharach et Kraftwerk. Deux noms qui me semble-t-il n'ont pas grand chose à voir avec ce que contient le disque. Si je devais chercher des points de comparaison, ce serait plutôt chez Broadcast et Leonard Cohen que je les trouverais. Tout le disque baigne ainsi dans une ambiance d'électronique élégante, vaguement jazzy et qui me rappelle Broadcast ou, à la limite, certains morceaux de Stereolab. La deuxième référence ne vaut que pour la chanson qui donne son titre à l'album, où un certain Gogi chante, avec une voix qui m'évoque celle de Cohen, des phrases du genre "Post Industrial Boys have a wonderful voice. They read some James Joyce and make a careful choice. Post Industrial Boys subscribe to Village Voice." ou "Dow Jones Average tells hypocrisy of postindustrial mediocracy." sur un petit tapis de boîte à rythmes et quelques notes de synthé. S'il est sorti une plus belle chanson en 2004, je dois encore la découvrir. Tout le reste de l'album est à l'avenant, en majorité chanté en russe et, sur un titre, dans une langue imaginaire (ce qui pour moi revient un peu au même). L'avant-dernier morceau, Kampolina, sonne lui comme une BO de Badalamenti (c'est un compliment). En définitive un disque presque parfait.
Max Richter - The blue notebooks (Fat Cat)
Voilà un disque qui va beaucoup profiter de la réécoute de janvier. J'en avais gardé le souvenir d'un très bel album de "nouvelle musique" néo-tonale, sorte de requiem pour cordes et piano évoquant à la fois les contemplatifs slaves à la Arvo Pärt et les minimalistes américains, beau mais un peu trop évanescent pour enthousiasmer réellement. En le réécoutant, je dois bien admettre qu'il est tout de même assez emballant et pas si transparent que cela. Certes, le disque porte parfois ses références comme un étendard. J'étais ainsi très fier d'avoir repéré à quel point la plage 4 était un hommage au premier album de DJ Shadow (à Stem plus précisément), avant de me rendre compte que son titre était Shadow Journal. De même, Arboretum sonne étrangement comme un inédit des 'Metamorphosis' pour piano seul de Philip Glass. Written in the sky semble lui avoir été composé pour servir de bande-son à la dernière scène d'un film tragique. Je l'imagine assez bien par exemple en fond sonore d'une scène de naufrage où le héros se noierait après avoir réussi in extremis à placer son fils sur un radeau de fortune. La caméra suivrait en contre-plongée la descente de son corps s'abîmant dans les profondeurs tandis qu'en arrière-plan on verrait le radeau flotter sur la surface et s'éloigner vers le lointain. Juste avant le générique, un gros plan nous montrerait le visage apaisé du père ayant sauvé son enfant d'une mort certaine puis (allons au bout de nos idées) un léger mouvement de caméra nous montrerait son poing serré d'où dépasserait la chaîne d'un médaillon, celui que lui avait offert sa femme au début du film. Ce serait d'autant plus émouvant qu'elle serait morte en donnant naissance à l'enfant. Ils seraient ainsi tous les deux morts pour le mener à l'âge adulte. Ce serait beau. Les Oscars pleuvraient comme des grenouilles dans un film à Oscars et Max Richter aurait composé la musique.
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