lundi, janvier 24

Les albums de 2004 (XII)

Einstürzende Neubauten - Perpetuum Mobile (Mute)
Quand on me décrivait un concert d'"Einsturz", les termes qui revenaient le plus souvent étaient "industriel", "tôle" et "perceuse". Lorsque je suis enfin allé les voir en avril dernier, je m'attendais donc à quelque chose de très sauvage et de passablement barré. Force est de reconnaître que si ces termes recouvrent bien une partie de la réalité, ils font abstraction d'une autre, au moins aussi importante, qui serait elle mieux décrite par les termes : "chuchotement", "mélodie" et "silence". Sur disque, c'est un peu pareil. L'album m'intéresse surtout par ses morceaux les plus calmes (Grundstuck) ou sa capacité à générer une alternance de bruit et de calme au coeur de la même chanson. On souhaiterait ainsi que Perpetuum Mobile soit conforme à son titre et ne s'arrête jamais de passer de l'un à l'autre. Le disque contient aussi des chansons franchement pop (YouMe & MeYou), voire presque dansantes (Der Weg Ins Freie). J'étais allé voir ce concert par curiosité sans rien en espérer de particulier et en suis ressorti bien plus enthousiaste que je ne l'aurais cru. Le disque a ensuite confirmé que EN possède bien toutes les caractéristiques du groupe dont je pourrais devenir fan.

The Magnetic Fields - i (Nonesuch)
Stephen Merritt est indéniablement une personnalité attachante et ses textes ont un côté délicieusement 'écrit' ("So you quote love unquote me" par exemple). Pourtant, je ne suis jamais parvenu à réellement le considérer à la hauteur de sa réputation. A sa décharge, l'adoration aveugle qu'il suscite chez certains rend la tâche quasiment impossible. L'album s'intitule I car toutes les chansons ont un titre qui commence par la lettre I et une fois sur deux par le pronom I. On nage donc en pleine confession autobiographique, pour ne pas dire en plein délire mégalo. I thought you were my boyfriend contient une petite mélodie au piano assez irrésistible et In an operetta est un beau pastiche. Pourtant, le disque souffre de se cantonner dans un registre mid-tempo avec un son qui varie peu. Les chansons que l'on peut chantonner sont assez rares et je doute que celles dont on étudiera les textes à l'université dans 20 ans soient tellement plus nombreuses. Du coup, si le disque fonctionne à moitié sur plusieurs tableaux (pop, confessions, sophistication des arrangements,...), il ne fonctionne parfaitement sur aucun. De plus, je pensais que le fait de se vanter de n'avoir utilisé aucun synthé pour enregistrer un disque était officiellement devenu ringard en 1981, d'autant que je me demande alors vraiment d'où vient ce son au début de I thought you were my boyfriend.

The Dead Texan - S/T (Kranky)
J'ai déjà en gros dit ce que j'en pensais dans mon billet sur le concert du groupe il y a quelques jours. Adam Bryanbaum crée ici à l'aide de longues nappes (et d'un soupçon de guitares) une série de vignettes à la limite de l'ambient et du new-age qui lorgnent de manière assez évidente vers Brian Eno. Malheureusement, avec 11 morceaux pour 46 minutes, il a un peu tendance à passer trop rapidement sur ses bonnes idées. L'ambient est une musique qui demande du temps et de l'espace pour se déployer et il semble bizarrement avoir eu peur de faire trop long. Ainsi, le morceau Glen's goo, avec ses 4 petites minutes, ne donne qu'un avant-goût frustrant de ce qu'il aurait pu être (et fut dans une certaine mesure lors du concert). Aegina Airlines sonne comme un hommage à the Plateaux of Mirror, le disque de Brian Eno et Harold Budd mais, de nouveau, 2:48 est bien trop court pour que la magie puisse opérer réellement. Bizarrement, dans cette course à la concision, les morceaux auxquels il a accordé le plus de place sont souvent les moins intéressants (La ballade d'Alain Georges ou Beatrice pt. two). Le meilleur moment du disque est sans doute When I see Scissors I cannot help but think of you, notamment à cause d'un très bel emploi du piano. Etrange disque donc, qui contient une poignée de bonnes idées, malheureusement sous-exploitées, et pas mal de remplissage. Franchement, à tous ceux qui s'enflamment comme des torches à la simple mention de cet album, je ne peux que conseiller de se précipiter sur les disques de Brian Eno (On Land et The Plateaux of Mirror par exemple) ou même la BO de Solaris par Cliff Martinez. Ils y trouveront à mon avis en nettement plus abouti tout ce qui n'existe qu'en germes sur cet album.

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